jeudi 19 août 2010

La vieille folle et la Mer...





De mère à mer,
on se comprend
Dolente écume
Salée amère
Prends bien soin
de mon enfant
L’ingrat petit
Il te préfère

Je l’ai nourri,
Gorgé mon sein
De flots d’amour
Et de prières
Sué mes rêves
Pour qu’il me fuie
Moi la sénile
La vieille mégère…

Mon fils à moi
Ne rêvait pas
Tranquille et las
Dans son berceau…
Dans son cerceau
Tournait le monde
Tournaient le sol
Et les éthers
Sa terre était
Plate et bornée
Il n’y avait rien
Derrière la mer

Il grandissait
Un peu trop vite
Un peu trop gros
Pour son jeune âge
Un peu bébête
et tête en l’air
La vie tenait
Dans son assiette
Son pain du jour
Son verre de thé
Un peu de graisse
Quand il pouvait
Un peu d’amour
Pour son dessert

Mon fils à moi
N’avait jamais
Vu de goudron,
Il n’avait pas
Rêvé de faire
Un tour de piste
A deux ou quatre
Roues de « GoodYear »
Mon fils avait
Pour seule monture
Une carriole
Charrette à l’âne
Identitaire

Mon fils était
Un jeune gaillard
L’esprit bien vide
L’âme débonnaire
Il connaissait
De Dieu deux noms
Quelques sourates
De son coran…
On lui parlait
De ces pays
Où l’existence
Etait d’enfer
Plein de houris
Vins inconnus
Eden à vie
Et sans prière
Mon Kamikaze
Rêvait ainsi
Son paradis
Bien éphémère

Un jour à l’aube
Il est parti
Je l’ai suivi
Couru nu-pieds
Et sans fichu…
Criant au feu
Amour ulcère
Je l’ai perdu
Vingt, vaines fois
Sur ce sentier
De suicidaires
Port de Tanger
Où la vie tangue
Sur des canots
Patibulaires

Je veux mon fils !
Je veux mon sang !
Mon sans papiers
Sans ambitions !

Depuis, ma vie
N’est que station
Une aire sans
Propriétaire
Au pas du port,
J’ai mon adresse
Ici je dors…
C’est là que j’erre
Et ce Facteur
Qui me renie
Mon droit d’amour
Epistolaire
Je le maudis,
J’écume ma haine !
Cailloux de larmes
Sur sa casquette !
Crachats de peine
Sur sa jaquette !
Un sombre idiot,
Mais dites le lui
Que ma folie
Est passagère

De mère à mer,
On se comprend
Dolente écume
Salée amère
Prends bien soin
De mon enfant
L’ingrat petit…
S’il te préfère
Si tu l’as pris
Noie mon chagrin
La vie reprend…
Je ne sais faire …


11 commentaires:

David Gendron a dit…

Ravi d'apprendre que tu es de retour! :)

Fedwa a dit…

hey! heureuse de te voir ici MA grande :))

David Gendron a dit…

HA HA HA! ;) Je ne l'oublierai pas non plus!

C'est super que tu ne l'aies pas oublié!

Fedwa a dit…

j'ai une mémoire fabuleuse dès qu'il s'agit de ça, pour le reste suis un poisson rouge :))

Anonyme a dit…

l'appel du large et le chant charmeurs et charmant des sirénes de l'autre rive est parfois trop fort et plus captivant que "l'appel du sang" . bravo à toi Waayli pour savoir transcrire un drame social sous une forme poetique et esthétique.voila de quoi mettre Hemingway(de son vivant) jaloux pour son "vieux et la mer". je ss un fan assidu et accro"ché" à toi.ne me laisse pas tomber,inspire moi pour mon nouveau blog, 3afaaak.j'ai l'angoisse de la page blanche.

Salvadorali a dit…

bravo pour cette touchante mécanique poétique, j'espère que le terme "mécanique" ne te choque pas ?
mais j'aime les mots quand ils font clic-clic, qu'ils s'articulent comme par ingénierie, j'aime les poètes et la poésie, je me suis donc senti bien chez toi...
me voici donc imprégné de cette scène absolue de dramaturgie, de l'image en somme de cette folle sur une plage amère que tu viens de graver dans nos esprits.
je pense aux folles de la place de mai, au chili... je pense aux mères de tous les mozart assassinés... à pablo neruda aussi... merci !

Fedwa a dit…

Salvadorali: Merci pour ce très gentil commentaire.. ça me fait espérer que mon inspiration ne me boude pas trop longtemps :)

Anonyme a dit…

Je pense aussi à la mère de Fodail, citoyen marocain assassiné dans un commisariat marocain récemment.

La mer, dans ce cas, n'est que l'impunité de l'autorité

Housseine a dit…

C'est en lisant ce genre pamphlet que je me dis que je dois vraiment me remettre au blogging.

Bravo c'est beau.

Fedwa a dit…

Merci beaucoup :)

Kyla Curtis a dit…

Thiis was great to read